Information Technique : Les bétons projetés fibrés
Fibres
Les fibres couramment utilisées dans les bétons projetés sont :
des fibres métalliques conformes à la norme NF EN 14889-1 (fibres d’acier ou fibres métalliques amorphes) ;
des fibres polymères conformes à la norme NF EN 14889-2.
En fonction de leur nature, de leur forme, de leur géométrie et de leur dosage, les fibres confèrent au mélange à projeter et au béton projeté en place des propriétés physiques et mécaniques spécifiques :
augmentation de la cohésion du mélange frais (pour un mélange à projeter par voie mouillée) ;
amélioration de la cohésion du béton projeté frais sur le support ;
augmentation de la résistance au cisaillement du béton projeté frais permettant une augmentation de l’épaisseur projetée ;
limitation de la fissuration du béton projeté durci grâce à la répartition des contraintes de traction ;
ductilité du béton projeté durci ;
renforcement structurel du béton projeté durci par substitution des armatures par des fibres métalliques ;
amélioration de la résistance à l’écaillage en cas d’incendie (microfibres polymères).
Les fibres métalliques sont utilisées pour augmenter la ductilité du béton projeté ou pour remplacer, partiellement ou totalement, les armatures du béton armé.
Elles peuvent être prises en compte dans le dimensionnement des ouvrages en béton projeté et ont été introduites dans le Model Code 2010.
En projection, des macrofibres synthétiques (de longueur supérieure à 30 mm) peuvent être utilisées, notamment pour augmenter la ductilité du béton. Elles ne rentrent actuellement pas dans le champ d’application du Model Code 2010 même si leur rôle peut être structurel.
Les microfibres synthétiques utilisées pour diminuer la fissuration de retrait au jeune âge ou pour limiter le risque d’écaillage des bétons soumis à un incendie sont rarement utilisées dans les bétons projetés. Elles peuvent l’être dans des cas très spécifiques, sous réserve de vérifier leur efficacité par rapport à l’objectif visé lors d’une épreuve de convenance.
La longueur courante des fibres structurelles doit être supérieure ou égale à 30 mm et à 2 fois le diamètre maximum des granulats.
La longueur des fibres métalliques doit être inférieure à 2/3 du diamètre du tuyau de projection (surtout en voie mouillée).
Dosage en fibres dans les bétons projetés
Les dosages en fibres couramment utilisés :
pour les fibres métalliques : entre 20 et 50 kg/m³ selon le type de fibres et le type de travaux à réaliser ;
pour les fibres polymères : entre 5 et 8, voire 9 kg/m³.
Le dosage en fibres doit être choisi en fonction des spécifications exigées.
Pour des niveaux d’exigence élevés, il peut être nécessaire de vérifier que les objectifs sont atteignables en ajoutant aux épreuves d’étude une phase de projection afin de ne pas prendre le risque que des résultats insuffisants retardent l’avancement des travaux prévus. Le dosage en fibres est définitivement validé lors de l’épreuve de convenance.
Béton Projeté Renforcé de Fibres Métalliques (BPRFM)
Historiquement, les fibres métalliques ont été introduites dans la composition du béton projeté comme alternative au renforcement du béton à l’aide d’un treillis soudé.
Les études menées sur des bétons projetés renforcés par des fibres métalliques ont montré une répartition homogène des fibres dans la matrice cimentaire, une orientation de ces fibres dans un plan parallèle au support de projection et une finition acceptable, malgré la rugosité du parement final liée à la présence de fibres. Cette répartition optimise l’efficacité des fibres pour la résistance à la flexion.
Le dimensionnement de ces bétons a été introduit dans le Model Code 2010, qui est en cours d’intégration dans les normes Eurocode. Les fibres métalliques ont également un avantage mécanique sur les treillis et les armatures : elles présentent un module de Young élevé (200 GPa) ainsi qu’une résistance en traction élevée (entre 1 300 et 2 300 MPa) pour les plus résistantes alors que les armatures sont limitées à 500 MPa. De plus, les fibres métalliques contribuent à limiter le fluage du béton et à limiter sa fissuration de retrait. En effet, les fibres couturent les fissures dans toute l’épaisseur du béton y compris au niveau du parement.
Il a également été démontré que la résistance mécanique du BPRFM ne dépend pas directement du dosage en fibres dans le béton, mais du « kilométrage » de fil correspondant, qui peut aller de 6 à 950 km/m³ en fonction du type de fibres et de leur dosage. Ainsi, pour un dosage donné, les fibres de diamètre plus petit sont plus performantes.
Enfin, l’absence de treillis soudé assure une adhérence optimisée du BPRFM sur la paroi, évitant tout risque de « vide » qui pourrait apparaître lorsque le béton s’agglutine contre les armatures (phénomène pouvant se produire principalement en cas de projection par voie mouillée).
Essais de fluage pilotés par le CETU et l’ASQUAPRO
Lorsque le béton projeté fibré est utilisé comme soutènement définitif, outre les performances à 28 jours, il y a une interrogation sur sa capacité à long terme à reprendre les poussées induites par les convergences du terrain, notamment après l’apparition des premières fissures dans le béton. Le rôle des fibres est de conférer au béton une résistance en traction après l’apparition de la fissuration. Cependant sur le long terme, comment se comportent-elles ? La structure possède-t-elle toujours suffisamment de performance pour maintenir son intégrité ?
C’est pour tenter de répondre à ces questions qu’un essai de fluage en « poinçonnement-flexion » sur béton projeté fibré a été développé conjointement entre les membres de l’ASQUAPRO, du CETU, de la SNCF et du laboratoire SIGMA BETON. Cet essai, d’une durée de 1 an, a fait l’objet d’une campagne à grande échelle en 2014 et de communications scientifiques. Un protocole complet a été mis au point. De nouveaux tests ont été réalisés en 2019 pour affiner les protocoles et obtenir des données statistiques de répétabilité de l’essai.
Des réflexions sont en cours pour réduire encore la dispersion des résultats et évaluer l’évolution dans le temps des caractéristiques mécaniques utilisées pour le dimensionnement des ouvrages.